Commande frauduleuse au nom de votre entreprise : comment éviter le piège de l’usurpation d’identité ?
Un fournisseur vous réclame le paiement d’une commande que vous n’avez jamais passée. Un huissier vous signifie une injonction de payer fondée sur un bon de commande falsifié. Un escroc a utilisé le nom de votre société pour se faire livrer du matériel. Vous êtes peut-être victime d’une escroquerie commerciale par usurpation d’identité.
De plus en plus de TPE, PME et même grandes enseignes sont ciblées par ces arnaques d’un genre nouveau. Dans cet article, nous vous expliquons comment ces fraudes fonctionnent, comment les détecter à temps, et surtout : comment réagir.
Comprendre l’escroquerie à la fausse commande : une menace bien réelle
Une commande jamais passée, mais une facture bien réelle
Le scénario est souvent le même : une entreprise reçoit une relance ou une mise en demeure pour des produits qu’elle n’a ni commandés, ni reçus. Pourtant, le fournisseur prétend disposer d’un bon de commande, d’un mail, parfois même d’un contrat signé. Ces documents ont été fabriqués à partir d’éléments récupérés sur internet ou par piratage.
Il s’agit d’un type de fraude particulièrement sournois, souvent orchestré par des réseaux bien organisés. On parle parfois de fraude au faux client, ou encore d’arnaque au faux bon de commande.
Quand la fraude vise les fournisseurs eux-mêmes
Dans d’autres cas, c’est le fournisseur qui est piégé. Il croit traiter avec un client sérieux, bien identifié (souvent une grande marque), et expédie la marchandise sans se méfier. Quelques jours plus tard, il réalise qu’il a été abusé : le destinataire n’est pas celui indiqué dans ses bases clients. Le site de livraison n’est pas celui habituel. L’adresse mail est légèrement différente. Le paiement n’arrive jamais.
C’est le modèle typique de la fraude dite « au président », dérivée ici en « fraude à la commande ».
Les méthodes des fraudeurs : usurper une identité, en finesse
Une signature contrefaite, un tampon imité, un mail falsifié
Les fraudeurs utilisent une combinaison d’éléments :
- Une fausse adresse mail ressemblant à celle de l’entreprise cible (ex. :
comptabilite@auchamp.fr
au lieu decomptabilite@auchan.fr
) ou (comptabilite@ikea.fr
au lieu decomptabilite@lkea.fr
) - Un faux tampon reprenant le logo et les mentions légales de l’entreprise réelle ;
- Une signature scannée trouvée sur un ancien document ;
- Un numéro de téléphone non géolocalisable ;
- Un bon de commande au format PDF imitant les bons officiels ;
- Une adresse de livraison différente, mais dans la même région, pour rester crédible.
Le tout crée l’apparence d’un client légitime. La vigilance du fournisseur peut alors être mise en défaut, notamment en cas de pression commerciale ou d’urgence logistique.
La fraude au président, version fournisseur
Initialement utilisée pour détourner des virements internes, la fraude au président a été adaptée au commerce interentreprises. Un faux dirigeant, un faux directeur achat ou un faux responsable juridique contacte un fournisseur, en urgence, pour débloquer une commande.
On joue sur la panique, la pression, l’urgence d’un projet. Et parfois, cela suffit à faire tomber les filtres habituels. La livraison a lieu. Et le préjudice financier peut être très élevé.
Injonction de payer : le levier judiciaire de la fraude
Des documents falsifiés à l’appui d’une procédure simplifiée
Les fraudeurs les plus malins ne s’arrêtent pas là. Une fois la livraison effectuée, ou même sans livraison, ils peuvent entamer une procédure d’injonction de payer contre la victime, en se faisant passer pour le fournisseur légitime.
L’injonction de payer est une procédure rapide, souvent non contradictoire au départ. Elle peut donner lieu à une ordonnance du juge, sans que la société usurpée ait pu s’expliquer.
Si vous recevez une telle ordonnance, il est essentiel de faire opposition immédiatement. Cela suspend l’exécution forcée et permet de porter l’affaire devant le tribunal pour démontrer la fraude.
Que faire si vous êtes visé par une telle action ?
- Rassemblez immédiatement tous les éléments prouvant que vous n’êtes pas à l’origine de la commande (relevé personnel, registre du personnel, registre des achats, historique de commandes, historique des échanges internes).
- Déposez plainte pour usurpation d’identité commerciale auprès de la gendarmerie ou de la police.
- Consultez un avocat pour organiser l’opposition et la défense au fond.
Sur cette question, consultez la page dédiée au recouvrement de créance sur le site de Me Julien Sabos.
Comment se défendre face à une commande frauduleuse ?
Démontrer l’anomalie du processus contractuel
Devant le juge, il ne suffit pas de dire « ce n’est pas nous ». Il faut démontrer que le processus contractuel présenté est matériellement incohérent :
- Nom d’un salarié inconnu de la société ;
- Adresse mail jamais utilisée ;
- Numéro de téléphone inexistant ou situé à l’étranger ;
- Absence d’échange antérieur ;
- Adresse de livraison non référencée dans la base logistique ;
- Absence de bon de réception ;
- Facture sans numéro SIRET ;
- Compte bancaire du prétendu fournisseur incohérent avec sa domiciliation.
Produire les bons justificatifs
Votre avocat pourra utilement produire :
- Le Kbis officiel de la société ;
- Les attestations du dirigeant ;
- Une attestation du prestataire mail ou du service informatique ;
- La plainte pénale ;
- La preuve de l’absence de livraison ;
- La liste des salariés autorisés à passer commande ;
- La charte interne d’achat (si elle existe).
Comment éviter ce type d’escroquerie dans votre entreprise ?
Les bons réflexes à adopter
- Mettre en place un circuit de validation clair pour les bons de commande ;
- Interdire toute livraison sur une adresse non validée ;
- Former les équipes commerciales à la détection des signaux faibles ;
- Exiger des coordonnées fixes et vérifiables (Kbis, RIB, numéro de TVA intracom) ;
- Créer un système de double validation pour toute commande hors procédure.
En cas de doute : ne pas livrer, et appeler
Une règle simple : si un élément semble bizarre, ne validez rien sans appel téléphonique à un contact connu. Ne vous fiez jamais uniquement aux mails. Les fraudeurs savent parfaitement les imiter.
Victime d’une escroquerie commerciale ? Agissez vite
La fraude à la commande peut coûter très cher, financièrement comme en réputation. Si votre société a été usurpée, ou si vous pensez avoir été piégé par un faux client, il est essentiel de réagir sans attendre.
Déposez plainte, rassemblez les preuves, et consultez un avocat pour organiser votre défense ou faire opposition à l’injonction de payer.
📞 Vous êtes concerné ? Contactez le cabinet de Maître Julien Sabos, avocat à Dunkerque, pour un accompagnement personnalisé.